Luzerne tachetée: une adepte des tatouages?
Medicago arabica (Luzerne tachetée ou Jerzas — pour Luzerne ou Vesce — en poitevin-saintongeais) appartient à la famille Fabaceae (et plus précisément un membre de la sous famille des Papilionacées — Papilionaceae — dont les membres montrent des fleurs en forme de papillon, voir l'article complet sur le sujet).
Le nom Medicago renvoie à la Médie, une région d’Asie Mineure située au nord-ouest de l’Iran actuel, entre la mer Caspienne et le Golfe Persique, qui était habitée par les Mèdes pendant l'antiquité. Medicago arabica serait donc une étrangère originaire du bassin méditerranéen.
Fleurs de la Luzerne tachetée: une corolle jaune typique des «Papilionacés», formée d'un étendard au dessus, de deux ailes recourbées à gauche et à droite et d'une carène en bas.
Medicago arabica est une
annuelle qui préfère les sols bien exposés, riches en matière organique (prairies
alluviales) et en azote (bords de route et terres cultivées). Année après année, ses colonies semblent s'étendre de manière «circulaire», fleurissant dès le mois de mai, resemant généreusement ses gousses épineuses et spiralées, et dépérissant (curieusement) du centre vers la périphérie, un peu avant l'été.
Fruits (gousses) de la Luzerne tachetée, Saint Benoît (86)
Ses folioles (chaque feuille est constituée de trois parties distinctes ou folioles) sont souvent marquées en leur centre d'une tache noirâtre.
Feuilles de la Luzerne tachetée: alternes, trifoliées, folioles obcordées, dentées au sommet.
Comme toutes les légumineuses, Medicago arabica est riche et généreuse: de petites boules blanches (nodosités) sur ses racines abritent des bactéries locataires. Ces dernières sont capables d'utiliser l'azote atmosphérique pour fabriquer des ressources qu'elles partagent volontiers avec la plante hôte. Dès lors, on comprend pourquoi les légumineuses parviennent à pousser sur les sols les plus misérables; faute de sol, un peu d'air et d'amour leur suffisent. Les jardiniers le savent bien: la culture des fèves, des haricots ou des pois est aisée au potager, quelles que soient la nature et les qualités du sol.
Medicago arabica est donc un bon engrais vert: une fois fauchée, elle laisse racines, nodosités et (surtout) parties aériennes comme autant de provisions d'azote dont peuvent profiter les autres plantes alentours.
Nodosités de la Luzerne tachetée.
Medicago arabica fait un bon fourrage pour le bétail. La littérature quant à sa comestibilité pour l'homme n'abonde malheureusement pas. Les Luzernes ne présentent généralement pas de grands dangers, mais mieux vaut jouer la carte de la prudence. Quoi qu'il en soit, la bouloter ne nous rendra surement pas plus riche!
Collier-de-corail (Aricia agestis) et Luzerne tachetée au printemps (Biard)
Pour aller plus loin:
- Identification assistée par ordinateur
- Medicago arabica sur Tela-botanica
Cymbalaire des murs, Poitiers quartier gare.
Cymbalaria muralis (Cymbalaire des murs) est une rampante qui appartient aux Plantaginaceae, le clan des Plantains, dans les classifications les plus récentes. C'est avec ses sœurs de sève les Linaires (Linaria spp.) que l'«air de famille» est le plus manifeste.
De mai à septembre, ses fleurs violettes à deux lèvres et à gorge jaune habillent les murs qu'elle colonise; des fleurs qui se tournent vers le soleil jusqu'à leur fécondation (phototropisme positif), pour ensuite se détourner de la lumière (phototropisme négatif)! Ainsi, le pédoncule se courbe en retournant la fleur vers le mur, afin que les graines (contenues dans des capsules glabres et globuleuses) soient déposées dans une fissure proche.
La Cymbalaire des murs retourne ses fruits là où elle a vu le jour : contre le mur!
Ses feuilles circulaires ou réniformes, lobées, luisantes, charnues et comestibles sont légèrement concaves, ce qui lui vaut son nom Cymbalaria, c'est à dire la « nacelle » ou la « barque » en latin. Elle est vivace, ses parties aériennes de la plante sèchant pendant l'hiver pour repousser au printemps suivant.
Cymbalaire des murs, Poitiers bords de Clain
- Mais qu'est-ce que Rome, Maximus?
- J'ai vu beaucoup du reste du monde. Il est brutal, et cruel, et sombre. Rome est la lumière!(Gladiator, Ridley Scott)
Cymbalaria muralis affectionne les vieilles pierres (surtout calcaires), ce qui lui vaut son surnom usuel de Ruine de Rome. Mais la belle est incapable de causer la ruine d'un mur et encore moins celui d'un empire, contrairement à ce que son titre pourrait laisser penser. Son nom fait plutôt référence à ses origines méditerranéennes et à son penchant pour les cailloux.
Selon le botaniste poitevin Yves Baron, elle aurait été introduite volontairement depuis l'Italie au 15ème siècle pour habiller les rocailles et les vieux murs. Outre-manche, on la surnomme Oxfrod ivy (littéralement le Lierre d'Oxford): elle se serait introduite clandestinement au cœur de l'université anglaise en profitant de l'arrivée de statues de marbre en provenance d'Italie. Quelques déclinaisons de cette légende existent, concédant à la Sauvage les surnoms de Kenilworth ivy (Le Lierre de Kenilworth) ou plus simplement de Coliseum ivy (Le Lierre du Colisée).
Fleur de la Cymbalaire des murs: corolle en tube (prolongée d'un petit éperon à l'arrière), lèvre supérieure dressée et bilobée, lèvre inférieure trilobée avec deux bosses jaunes à sa base.
Autrefois, Cymbalaria muralis était utilisée en infusion pour
lutter contre le scorbut (carence grave en vitamine C). En application
externe, elle s'avère cicatrisante et hémostatique, permettant par
exemple d'arrêter un saignement; un vieux truc de gladiateur peut-être?
C’était un soldat de Rome, honorez-le.
(Gladiator, Ridley Scott)
«Ruine de Rome»: une coulée de lave végétale digne du Vésuve!
Pour aller plus loin:
- Identification assistée par ordinateur
- Cymbalaria muralis sur Tela-botanica
Colonne vertébrale de la Stellaire holostée
Stellaria holostea (Stellaire holostée ou Herbe à la vierge dans le Poitou) appartient à la famille cosmopolite des Caryophyllaceae, dont les membres présentent généralement des fleurs à cinq pétales et des nœuds (intersections entre tige et feuille) marqués.
Le terme grec holos veut dire «entier» et osteum «os», holostea est donc «tout en os»; les longues tiges quadrangulaires, raides et cassantes de Stellaria holostea étant comme des chaînes de tibias. Jadis, selon la théorie des signatures qui voulait que l'aspect d'un végétal exprime ses vertus thérapeutiques, la plante était utilisée pour soigner les fractures.
Fleur de la Stellaire holostée: 5 sépales, 5 pétales échancrés jusqu'à la moitié, 10 étamines libres autour d'un pistil à 3 styles.
Stellaria holostea est une vivace à souche traçante qui s'étale (reproduction végétative) sur des sols riches et équilibrés. A la belle saison (printemps), elle dresse sa fleur astrale blanche (Stella est «l'étoile» en latin) à cinq pétales échancrés; les semences qui en résulte n'aboutissent que très rarement.
Le reste de l'année (hiver compris), Stellaria holostea subsiste en couchant sur le sol ses parties aériennes «osseuses» et ses feuilles opposées, minces et lancéolées.
Stellaria holostea est comestible en salade, mais peu tendre (ou alors sous forme de très jeunes pousses). Il ne faut pas en abuser à cause de sa qualité légèrement laxative.
Pour aller plus loin:
- Identification assistée par ordinateur
- Stellaria holostea sur Tela-botanica
Fruit en formation (capsule) de la Stellaire holostée: un vaisseau spatial en forme d'œuf au plat!
Stellaire graminée (Stellaria graminea), une petite vivace des prairie, comme une version miniature de la Stellaire holostée.