Capitule de la Pâquerette: joyeuses Pâques!
Bellis perennis (Pâquerette ou Margarite en poitevin-saintongeais) appartient à la famille Asteracea (dites Composées), dont tous les membres présentent une multitude de fleurs minuscules regroupées en un capitule (ici par exemple, le cœur jaune de Bellis perennis est composé de nombreuses fleurs jaunes miniatures en tube, entourées de fleurs blanches imitant la forme de pétales).
Jour de pluie: la Pâquerette refuse d'ouvrir les volets...
En latin, Bellis perennis est, littéralement, la beauté éternelle... Une référence à la vierge Marie; c'est la fleur de l’innocence. Les chrétiens aiment à raconter une histoire à son sujet: Un jour, Marie voulut consoler son fils Jésus qui s'était piqué avec une épine en lui offrant Bellis perennis. Une goutte de sang du christ tomba sur les pétales, laissant depuis à leur extrémité un léger ton rosé.
Tous les pays qui n'ont plus de légende seront condamnés à mourir de froid.
(La Quête de joie, Patrice de La Tour du Pin)
Bellis perennis, à jamais la plus belle!
Poitiers quartier Chilvert
Bellis perennnis montre ses fleurs blanches toute l'année durant, en dehors des périodes de gel, mais son nom Pâquerette vient de ses floraisons particulièrement massives autour des fêtes de Pâques. Elle pousse sur tous les types de sols, jusqu'à 2200 mètres d'altitude. Le vent ressème spontanément ses fruits (cependant dépourvus de soies pour le vol, ils ne vont guère loin), pendant que la plante d'origine se propage grâce à ses stolons (elle est vivace).
La Sauvage supporte bien le piétinement; elle s’adapte aux tontes régulières, ses tiges florifères repoussant rapidement après le passage des tondeuses… Bref, la Sauvage est toute à son aise en compagnie de l’homme et l'affection est généralement réciproque.
Fruits de la Pâquerette: des akènes dépourvus de soies (les plumes pour voler), plutôt rare chez les Astéracées...
Bellis perennis ferme ses fleurs à la tombée de la nuit, et s'ouvre avec l'apparition du soleil. Elle se ferme également lors des averses, voir légèrement avant selon la légende; elle permettrait ainsi d'annoncer les pluies juste avant l'arrivée de celles-ci, telle une grenouille météo!
Jeunes feuilles spatulées disposées en «rosette»,
Pâquerettes, Poitiers quartier Chilvert
Bellis perennis est une comestible riche en calcium, mais crue, sa saveur est âcre. C’est pourquoi ses capitules ne servent le plus souvent qu’à décorer les plats. Ses propriétés médicinales sont évoquées depuis la renaissance : elle serait antalgique (en usage externe ou interne) au même titre de que la célèbre Arnica des montagnes (Arnica montana), mais la pharmacopée française ne la retient pas en tant que plante médicinale.
Une fausse jumelle: La Vergerette de Karvinski
La Vergerette de Karvinski (Erigeron karvinskianus), aussi surnommée Pâquerette des murailles, est une vivace rustique originaire du Mexique, cultivée dans les rocailles. Elle s’ensauvage peu à peu en France, quittant les jardins d’ornement pour vagabonder sur les trottoirs et les murs de nos cités. Si ses capitules ressemblent à ceux de la célèbre Pâquerette, ses tiges ramifiées dressent des feuilles très différentes, souvent trilobées.
Pour aller plus loin:
- Norb de Sauvages du Poitou raconte la Pâquerette au micro de France Bleu Poitou
- Identification assistée par ordinateur
- Bellis perrennis sur Tela-botanica
La Mélitée du Plantain (Melitaea cinxia) devant son bol de Pâquerette au petit déjeuner
Colonne vertébrale de la Stellaire holostée
Stellaria holostea (Stellaire holostée ou Herbe à la vierge dans le Poitou) appartient à la famille cosmopolite des Caryophyllaceae, dont les membres présentent généralement des fleurs à cinq pétales et des nœuds (intersections entre tige et feuille) marqués.
Le terme grec holos veut dire «entier» et osteum «os», holostea est donc «tout en os»; les longues tiges quadrangulaires, raides et cassantes de Stellaria holostea étant comme des chaînes de tibias. Jadis, selon la théorie des signatures qui voulait que l'aspect d'un végétal exprime ses vertus thérapeutiques, la plante était utilisée pour soigner les fractures.
Fleur de la Stellaire holostée: 5 sépales, 5 pétales échancrés jusqu'à la moitié, 10 étamines libres autour d'un pistil à 3 styles.
Stellaria holostea est une vivace à souche traçante qui s'étale (reproduction végétative) sur des sols riches et équilibrés. A la belle saison (printemps), elle dresse sa fleur astrale blanche (Stella est «l'étoile» en latin) à cinq pétales échancrés; les semences qui en résulte n'aboutissent que très rarement.
Le reste de l'année (hiver compris), Stellaria holostea subsiste en couchant sur le sol ses parties aériennes «osseuses» et ses feuilles opposées, minces et lancéolées.
Stellaria holostea est comestible en salade, mais peu tendre (ou alors sous forme de très jeunes pousses). Il ne faut pas en abuser à cause de sa qualité légèrement laxative.
Pour aller plus loin:
- Identification assistée par ordinateur
- Stellaria holostea sur Tela-botanica
Fruit en formation (capsule) de la Stellaire holostée: un vaisseau spatial en forme d'œuf au plat!
Stellaire graminée (Stellaria graminea), une petite vivace des prairie, comme une version miniature de la Stellaire holostée.
Grappes de fleurs de la Cardamine des prés, Poitiers bords de Boivre
Cardamine pratensis (Cardamine des prés) appartient à la famille Brassicacea (dites Crucifères), au même titre que sa petite sœur Cardamline hirsuta dont nous avons déjà parlé sur Sauvages du Poitou. Comme cette dernière, Cardamine pratensis produit de longs fruits (siliques) explosifs pour disperser ses graines; mais contrairement à Cardamine hirsuta, Cardamine pratensis est vivace (elle repousse chaque année depuis son court rhizome).
Cardamine des prés, Poitiers bords de Boivre
De plus, Cardamine pratensis possède l'étrange faculté de pouvoir se multiplier à partir d'une de des feuilles de sa rosette (à sa base): une feuille en contact avec un sol humide développe un réseau racinaire tout le long de son pourtour, donnant naissance à un clone de la plante (reproduction végétative).
Feuilles inférieures de la Cardamine des prés, Saint Benoît (86)
Cardamine pratensis s'installe près des marais, des lacs, des rivières, dans les prairies humides; elle est le signe d'un sol gorgé d'eau et riche de matière organique. Ses grandes fleurs blanches, roses ou violettes (jusqu'à 2cm pour les pétales) se montrent très brièvement entre avril et mai.
Cardamine des prés, la petite baigneuse!
Autrefois, on demandait aux enfants de ne jamais la cueillir, sous peine de se faire mordre par un reptile dans l'année à venir... C'était surtout le moyen d'inviter les plus jeunes à s'éloigner des zones humides où la belle prolifère. Derrière chaque légende se cache une bonne part de sagesse: j'ai pour ma part faillit perdre une basket dans la vase en voulant approcher la Sauvage pour la photographier!
A table avec le Grand Bombyle ! (Bombylius major sur Cardamine des prés, Poitiers bords de Boivre)
Cardamine pratensis est en réalité une comestible prisée (les cardamines étant parfois vendues sous le nom de Cressonnette sur les marchés poitevins), riche en vitamine C et en lipides; utilisée en condiment, elle apporte une délicieuse saveur piquante aux salades de printemps (les jeunes rosettes de feuilles à la base, cueillies juste avant floraison, sont les plus tendres).
Fleurs de la Cardamine des prés: 4 pétales, 6 étamines libres autour d'un pistil surmonté d'un style unique au centre.
C'est un bel après-midi d’avril, non loin de la grotte de Passelourdain à Saint Benoît (86). La nature peine à se réveiller mais déjà, les bords du Clain se parent ici et là de taches blanches ou parme. Blanches, pour les fleurs d’Alliaire; parme, pour la Cardamine des prés. Avril est le mois de notre Sauvage délicate! C’est donc aussi, par conséquent, le mois de la Cardamine en tant que plante-hôte d’un papillon qui exagère jusqu’à porter son nom: Anthocharis cardamines! Dit en français (et en plus poétique) : l’Aurore…
Perdu dans ces considérations, je repère une belle station de Cardamines des prés, au milieu des Orties. Là, sans trop de surprise, un mâle d’Aurore flâne et butine notre Sauvage. J'avance pour lui tirer le portrait. Je déclenche, m’approche trop près, il s’envole. J’inspecte alors chaque tige de la belle Sauvage et trouve un œuf, sorte de micro-pâtisserie en forme de cannelé orange… Appétissant!
Approchez le nez de l'écran: avez-vous trouvé l'oeuf de Madame Aurore?
Mais question goût, notre papillon laisse à désirer. Que les Mésanges et autres Rouge-gorges m’écoutent bien: l’Aurore, aussi appétissante soit-elle, se gave de diverses Crucifères (pas seulement les Cardamines) à l’état larvaire. Autrement dit, elle aurait un goût amer... de moutarde!
Monsieur Aurore sur Cardamine des prés, Saint Benoît (86)
Madame Aurore en train de pondre sur Cardamine des prés, Saint Benoît (86)
Pour aller plus loin :
- Identification assistée par ordinateur
- Cardamine pratensis sur Tela-botanica