Ico Liste des Sauvages par noms
Ico Retrouver une Sauvage par l'image
Ico Initiation à la botanique joyeuse!
Ico Villes, chemins & terrains vagues
Ico Prairies
Ico Haies & forêts
Ico Murs et rocailles
Ico Zone humide
Ico Grand banditisme (invasives)
Ico Bestioles
Ico Rencontres et billets d'humeur

Résultat de votre recherche


1 ... 8 9 10 11 12 ... 17
Orchis bouc, la piñata mexicaine
Date 18/06/2016
Ico Prairies

Himantoglossum hircinum, Orchis bouc, Biard (86)

Orchis bouc, Biard (86)


Himantoglossum hircinum (Orchis bouc) appartient à la prestigieuse famille des Orchidaceae, dont les membres fascinent les amoureux de nature. Peut être parce que parmi les 20.000 espèces connues sur le globe (on en découvre chaque année de nouvelles parait-il), seules 120 foulent le territoire français. Ou plus simplement, à cause de l'originalité de leurs fleurs (voir l'article complet sur le sujet) et de la sexualité complexe qui les accompagne. Ce qui est moins connu en revanche, c'est l'origine du mot Orchidée: celles ci doivent leur patronyme a leurs tubercules souterrains... Orchis étant le «testicule» en latin!

J’me laverai pas pour garder ton odeur!

(La vie est un long fleuve tranquille, Étienne Chatiliez)

Himantoglossum hircinum, notre Orchis bouc, enfonce en peu plus avant le clou de la poésie: il doit son nom à l'odeur peut sympathique qu'il dégage à son pic de floraison, qui pourrait séduire une chèvre en manque d'affection (Hircus est le «bouc» en latin... Les autochtones parlent plutôt d'une odeur de chabichou!). En réalité, l'odeur est surtout chargée d'attirer les insectes qui assurent sa fécondation, une stratégie plus économique pour la Sauvage que de se lancer dans la production de nectar (des populations d'Himantoglossum hircinum produisant un peu de nectar ont déjà été observée en Europe centrale, comme si la Sauvage était finalement devenue capable de récompenser les butineurs avant qu'ils ne se lassent de la supercherie).


Himantoglossum hircinum, Sauvages du Poitou!


Himantoglossum hircinum, Orchis bouc, Poitiers sous blossac

Rosette de feuilles glabres et charnues de l'Orchis bouc en automne


Himantoglossum hircinum est donc vivace de par son tubercule. La Sauvage affectionne les prairies calcaires pauvres et sèches, baignées de lumière. Comme ses consœurs, la belle nait dans des conditions peu habituelles: les graines d'Orchidées sont produites en quantité (jusqu'à un millier par fruit pour l’Orchis bouc, et jusqu’à 50 fruits par pied), mais elles sont minuscules (0,05 millionième de gramme pour l’Orchis bouc, de la poussière en somme) et en quelque sorte incomplètes. Pour germer, celles ci nécessitent l'aide d'un champignon «compagnon» (mycorhize) qui assurera leur alimentation dans les premiers stades de développement. Autant dire que le renouvellement des colonies d'Orchidées repose sur un équilibre naturel précis et précaire (en France, une espèce sur six est menacée de disparition). Leur floraison signe toujours le succès d'une recette magique dont l'issue était pourtant très incertaine!

Le monde est plein de magie, il suffit d’y croire. Alors faîtes un vœu... C’est bon? Bien. Maintenant croyez-y de tout votre cœur.

(Les frères Scott, Mark Schwahn)

Un milieu adéquat ne garantie pas pour autant la floraison d'Himantoglossum hircinum d'une année à l'autre: une fois installée, la Sauvage possède son rythme propre, où alternent floraisons spectaculaires et périodes discrètes de reproduction végétative (la probabilité de fleurir augmente avec le nombre de feuilles de la rosette).


Himantoglossum hircinum, Orchis bouc, Poitiers bords de Boivre

Orchis bouc, Poitiers bords de Boivre


Paradoxalement, certaines Orchidées – à l’image de notre Orchis bouc - ont trouvé une terre d’accueil toute à leur convenance dans les nouveaux no man’s land que sont les bords d’autoroute, les aéroports ou les jachères. C’est pourquoi entre mai et juillet, il n'est pas rare de croiser Himantoglossum hircinum sur les pelouses des jardins municipaux ou au bord des routes, même les plus fréquentées. N'allez pas croire pour autant que la belle est une pioche banale parmi les trésors du clan Orchidaceae: faites fi de son allure élancée (jusqu'à un mètre de hauteur), de ses couleurs un poil ternes et de son parfum douteux pour vous rapprocher d'elle...


Himantoglossum hircinum, Orchis bouc, Chezeau (86)

La danse de l'Orchis bouc, Chezeau (86)

Tous les trésors ne sont pas d'argent et d'or!

(Pirates des Caraïbes, la malédiction du Black Pearl, Gore Verbinski)

Himantoglossum hircinum fait honneur à la réputation de son clan: sa floraison offre un spectacle édifiant, digne de l'explosion d'une piñata mexicaine! Himas est la «lanière» et glossa la «langue» (bien pendue) en grec: les trois lobes du labelle de ses fleurs se déroulent comme des serpentins. Un éperon court (généralement dépourvu de nectar) prolonge le labelle interminable, sépales et pétales convergent au dessus des organes reproducteurs pour former un «casque» protecteur.


Himantoglossum hircinum, Orchis bouc, Buxerolles (86)

Orchis bouc, Buxerolles (86)

- Ça va trancher chérie!

- Mais non, qu’est ce que tu fais, il faut dire «ça va couper chérie»! Pas «ça va trancher»!

- Ah bon?

(La Cité de la peur, les Nuls)

Si les fleurs d'Himantoglossum hircinum sont ornées d'un «casque», celui ne peut pas grand chose face aux lames acérées d'une tondeuse à gazon... La Sauvage colonise pourtant les pelouses rases, et ne se plait guère dans les zones de friche laissées à l'abandon. Reste donc à trouver un terrain d'entente pour que tous profitent du spectacle de sa floraison; le mieux étant que les jardiniers (ou techniciens de espaces verts) apprennent à repérer ses rosettes au printemps pour les contourner et les laisser s'épanouir!


Pour aller plus loin:

- Norb de Sauvages du Poitou raconte l'Orchis bouc au micro de France Bleu Poitou

- Himantoglossum hircinum sur Tela botanica

- Himantoglossum hircinum, identification assistée par ordinateur

- Himantoglossum hircinum sur le site de  la Société Française d'Orchidophilie de Poitou-Charentes et Vendée

- Le coté obscure de l'Orchis bouc sur le site de Zoom Nature

- Orchis bouc, les caprices d'une Orchidée sur le site de Zoom Nature


Himantoglossum hircinum, Orchis bouc, Biard (86)

Orchis bouc: un paysage pour le moins fantastique!

 

Populage des marais, la Sauvage aux cent noms
Date 03/05/2016
Ico Zone humide

Caltha palustris, Populage des marais, Poitiers bords de Boivre

Populage des marais, Poitiers bords de Boivre


Caltha palustris (Populage des marais) appartient aux Ranunculaceae; une grande famille de Sauvages toxiques dont le nom viendrait du latin Rena, «grenouille», à cause de l'attrait pour l'eau de certains de ses membres. C'est le cas pour Caltha palustris: si vous voyez ses fleurs jaunes d'or, c'est que l'eau, courante ou stagnante, n'est pas très loin!


Caltha palustris, Populage des marais, Poitiers bords de Boivre

Populage des marais les pieds dans l'eau, Poitiers bords de Boivre


Caltha palustris est une vivace rustique qui aime les sols riches des marécages ou des bords de rivière. La Sauvage supporte même le bain, et peut survivre à des immersions (de courte durée). Ses rhizomes rampants peuvent former de belles colonies, dont les boutons dorés ne manquent pas de se faire remarquer au milieu d'une végétation encore bien timide au sortir de l'hiver.


Les anciens lecteurs du blog ne manqueront pas de penser à une autre pirate, la Ficaire (Ranunculus ficaria),  qui choisit comme Caltha palustris la basse saison pour montrer ses atouts! Il se trouve que les deux sœurs Ranunculacées se ressemblent, fréquentent les mêmes zones humides et les mêmes grenouilles!

Ainsi, tu as une sœur jumelle...

(Star Wars le retour du Jedi, Richard Marquand)

Si le risque de confusion est possible lors d'une première rencontre, il ne subsiste guère une fois les présentations effectuées. Caltha palustris montre souvent un port plus «royal» (jusqu'à 40cm, elle est d'ailleurs un peu plus regardante quant à la richesse du sol), et ses feuilles présentent par endroit un crénelage caractéristique.


Caltha palustris, Populage des marais, Poitiers bords de Boivre

Feuille inférieures du Populage des marais: cordées à la base, légèrement crénelées, pétiolées, à nervures réticulées.

- Il s’appelle Juste Leblanc.

- Ah bon, il n’a pas de prénom?

- Je viens de vous le dire: Juste Leblanc... Votre prénom, c’est François, c’est juste? Eh bien lui c’est pareil, c’est Juste.

(Le dîner de cons, Francis Veber)

Comme sa fausse jumelle Ficaire, Caltha palustris bat des records en matière de noms populaires... La botaniste Aline Raynal-Roques (dans La botanique redécouverte) comptabilise pas moins de 90 noms anglais (Marsh marigold, Kingcup, mais aussi de véritables morceaux de «poetry» anglaise comme Horse blob ou Water bubbles!), 140 noms allemands (Sumpfdotterblume!)... Et 60 noms français.


Rien que sur le Poitou, on peine à s’accorder sur son appellation en poitevin-saintongeais: Clair-bassin de rivière pour les uns, Gros-bouton-d'or ou Souci-d'Eve pour les autres... En France, elle est le plus souvent le Populage des marais, la Caltha des marais, le Souci d'eau ou la Sarbouillote... On comprend l'importance d'utiliser une langue unique (le latin, accompagné d'une nomenclature) pour les botanistes de toutes régions et de toutes nations.

Mon nom est Bond. James Bond.

(James Bond 007 contre Dr No, Terence Young)

C'est pourquoi il convient surtout de retenir Caltha palustris. Caltha pour le grec «Calathos», la corbeille, une allusion à la forme de ses fleurs; et palustris, traduction de «marais» en latin. Elle est la jolie corbeille des marais!


Caltha palustris, Populage des marais, Poitiers bords de Boivre

Fleurs du Populage des marais: cinq ou six tépales et une armée d'étamines; notez les feuilles supérieures sessiles.


Caltha palustris présente une spécificité qui peut passer inaperçue au premier coup d’œil: ses fleurs sont dépourvues de pétales... Vous n'êtes sans doute guère convaincus, aussi nous faut-il revoir ce que les ouvrages de botanique nous racontent à propos de la fleur. Pour rappel (voir aussi l'article complet sur le sujet):


La fleur «théorique», Sauvages du Poitou


Une fleur complète est composée de deux couronnes de «feuilles» particulières: les sépales à l’extérieur, qui jouent un rôle de protection (les sépales forment le calice), et les pétales à l'intérieur (et oui, les pétales sont aussi des feuilles!), qui jouent principalement un rôle d'attraction des butineurs (les pétales forment la corolle). Méditons un peu sur cette dernière phrase...


Sans calice, pas de corolle! Sauvages du Poitou


Lorsque la fleur n'a qu'une seule couronne (dans tous ses stades de développement), on considère que c'est un calice constitué de sépales (source Gaston Bonnier, Flore complète de France, de Suisse et de Belgique).


Nous y voilà: chez Caltha palustris, l'unique couronne est composée de cinq sépales jaunes d'or, qui ressemblent en tout point à des pétales (on dit que ses sépales sont «pétaloïdes»). Lorsque l’ambiguïté entre pétales et sépales est à son comble, les botanistes coupent la poire en deux en parlant plutôt... De tépales. Abracadabra!


Caltha palustris, Populage des marais, Poitiers bords de Boivre

Fruits (follicules) du Populage des marais, Poitiers bords de Boivre


Pour aller plus loin:

- Caltha palustris sur Tela-botanica

- Identification assistée par ordinateur

 

Fritillaire pintade, la Dame du Poitou
Date 06/04/2016
Ico Zone humide

Fritillaria meleagris, Fritillaire pintade, Saint Benoît (86)

Et soudain surgit face au vent, la vraie héroïne de tout l'étang! (Fritillaire pintade)


Fritillaria meleagris (Fritillaire pintade ou Coquelourde en poitevin saintongeais) appartient à la famille Liliaceae, dont les membres sont souvent des plantes à bulbes et à fleurs spectaculaires: Lys, Muguets, Jacinthes, Tulipes, Muscaris, Jonquilles (dans la classification classique)... Les Fritillaires tirent leur nom du latin fritillus, qui renvoie au petit gobelet dans lequel les joueurs secouaient les dés avant de les lancer sur la table; la robe de ses clochettes évoque le plumage tacheté de la Pintade (Fritillaria meleagris est parfois nommée Pintade ou Pintadine).


Fritillaria meleagris, Fritillaire pintade, Saint Benoît bors de Clain (86)

Fritillaire pintade sur tapis de Ficaire pour ouvrir la saison dès début mars!


Fritillaria meleagris est une vivace à bulbe qui s'installe sur les sols riches, sains et détrempés des prairies et des forêts alluviales: elle est une Sauvage spécifique des zones inondables. La Sauvage trouve ses origines en Europe, où elle est endémique (on ne la croise nul part ailleurs sur le globe). Mais Fritillaria meleagris est aujourd'hui en péril, car son habitat disparait peu à peu...


Les zones humides, considérées à tort comme des lieux insalubres et improductifs (ce sont en réalité des lieux où la biodiversité est particulièrement riche et variée), reculent sous l'effet de l'urbanisation (assèchements, remblaiements...), quant elles ne sont pas transformées en champs de cultures industrielles (maïs le plus souvent). Fritillaria meleagris, à l'image d'autres locataires des zones alluviales, a aujourd'hui disparue de plusieurs pays et régions de France. Là où elle subsiste, elle est souvent enregistrée comme espèce protégée, ou au minimum, surveillée de près par les associations et les autorités.


Fritillaria meleagris, Fritillaire pintade, Saint Benoît (86)

Fritillaire pintade, Saint Benoît (86)


Dans le Poitou, nous avons la chance de pouvoir croiser la belle Pintade au printemps sans trop de peine. Les départements de la Vienne et des Deux-Sèvres restent épargnés par le déclin national; néanmoins, le mouvement de recul de son habitat et de ses colonies n'épargnent pas la région. Il convient d'évaluer année par année ses populations, et de sensibiliser le plus grand nombre pour éviter que Fritillaria meleagris, devenue malgré elle un symbole de la nature poitevine, ne disparaisse.

Je suis là pour te sauver. Force d’intervention, matricule 38416, chargé de ta protection. Tu es la cible du Terminator.

(Terminator, James Cameron)

Il va sans dire qu'il faut éviter les cueillettes pour laisser la Sauvage se reproduire autant que possible. Mais surtout, il faut travailler d'arrache-pied à la sauvegarde des zones humides et encourager les modes de culture propres — Fritillaria meleagris est particulièrement sensible aux pollutions causées par les produits phytosanitaires — autour de celles ci: réduction des engrais, rétablissement de zones tampons autour des cultures... En attendant, notez, si vous avez un coin de jardin humide, qu'il est toujours possible de tenter de domestiquer Fritillaria meleagris en se procurant des bulbes chez un horticulteur.


Nous voulons des Fritillaires, Sauvages du Poitou !


Fritillaria meleagris, Fritillaire pintade, Montreuil-Bonnin (86)

Sous les jupes de la Fritillaire pintade: des fleurs tournée vers le sol, généralement solitaire (on peut exceptionnellement croiser des spécimens à 2 ou 3 fleurs), 6 tépales en damier pourpres et blancs, 6 étamines autour d'un pistil surmonté de 3 stigmates.


La reproduction végétative de Fritillaria meleagris (via son bulbe) est un processus lent et laborieux... Côté reproduction sexuée, la Pintade se montre tout aussi nonchalante: sa floraison printanière s'étale sur un court mois, avant d'offrir des fruits (de grosses capsules) qui se ressème spontanément. Les jeunes pousses qui pointent au printemps suivant ne montreront pas de fleurs... Avant la troisième ou quatrième année!


Fritillaria meleagris, Fritillaire pintade, Saint Benoît (86)

Feuilles de la Fritillaire pintade: alternes, minces, embrassantes, souvent arquées vers le sol.


Toute la plante (plus particulièrement le bulbe) renferme un alcaloïde, l'impérialine, qui peut s'avérer mortel pour l'homme en cas d'ingestion (risque d'hypotension et d'arrêt cardiaque). C'est toujours ça de gagné: Fritillaria meleagris ne risque pas de finir dans un panier fleuri, au milieu d'une récolte printanière de Sauvages comestibles! Et ce n'est pas une raison pour ne pas prendre soin d'elle, car, et c'est Jean Giono qui le dit (Un roi sans divertissement):

«On ne peut pas vivre dans un monde où l’on croit que l’élégance exquise du plumage de la pintade est inutile

Fritillaria meleagris, Fritillaire pintade, Migné-Auxances (86)

Des trous dans la Pintade... Assassin!


Fritillaria meleagris, Fritillaire pintade, Chasseneuil-du-Poitou (86)

Le coupable se révèle en fin de saison : Le Criocère du lis (Crioceris lilii), mangeur de Fritillaire, fait moins le malin lorsque ne restent que les fruits!


Pour aller plus loin:

- Fritillaria meleagris sur Tela-botanica

- Identification assistée par ordinateur


Fritillaria meleagris par Marie Corneille (1879)

L'hommage à la Dame du Poitou par une autre Dame du Poitou, Marie Corneille, artiste et botaniste des Deux-Sèvres de la fin du 19ème siècle; Une planche dénichée parmi les trésors du Fonds ancien de la bibliothèque universitaire de Poitiers.

 

1 ... 8 9 10 11 12 ... 17

MP  Mighty Productions
> Blogs
> Sauvages du Poitou
 
RSS       Mentions légales       Comms  Haut de la page