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Bryone dioïque, la sorcière
Date 29/10/2015
Ico Villes, chemins & terrains vagues

Bryonia dioica, Bryone dioïque, Poitiers parc des expositions

Fleurs nectarifères de la Bryone dioïque.


Bryonia dioica (Bryone dioïque ou Naveau sauvage en poitevin-saintongeais) appartient au clan Cucurbitaceae dont les membres sont tous plus ou moins rampants ou grimpants. C’est la famille des courges, des courgettes, des cornichons, des pastèques… Côté Sauvages en revanche, les Cucurbitacées sont très peu représentées sur le sol français. En dehors du sud de la France (où l’on peut aussi rencontrer le Concombre d’âne, Ecbalium elaterium), on ne recense qu’une seule représentante spontanée sur notre territoire : l’ensorcelante Bryone dioïque.


Bryone dioïque, jeune pousse, Biard (86)

Jeune pousse de Bryone dioïque, Biard (86)


Son nom trouve ses racines dans le grec ancien bryô signifiant «pousser avec vigueur». Ceux qui la côtoient dans leur jardin savent que la Sauvage n'a pas usurpé son titre. Bryonia dioica est une grimpante à croissance rapide qui se hisse en enroulant ses vrilles sur les plantes ou les branches alentour. Elle peut mesurer en fin de saison 4 à 6 mètres de long!


Bryonica dioica, Bryone dioïque, Poitiers quartier gare

Quand la Bryone dioïque attrape un Cerfeuil des bois (Anthriscus sylvestris) : Mais lâche moi la feuille!


Les vrilles de la Bryone se déroulent et s’allongent comme des fouets, décrivant de grandes rotations, à la recherche d’un support à agripper. Sensibles, les vrilles changent de stratégie, s’enroulant et se resserrant rapidement (24 heures leur suffisent) lorsqu’elles entrent en contact avec un objet dont la taille et la rugosité leur conviennent. Cette sensibilité au toucher émerveillait le naturaliste Charles Darwin qui consacra toute une monographie aux vrilles (On the Movements and Habits of Climbing Plants, 1865). En 1863, le naturaliste écrit à son ami et botaniste Asa Gray: «Mon principal cheval de bataille actuel (…), c’est les vrilles; leur sensibilité au toucher est merveilleuse». Comme on le comprend!


Brionia dioica, Bryone dioïque, Poitiers bords de Clain

Feuilles de la Bryone dioïque: alternessinuées dentées, palmatilobées en 3 à 5 lobes aigus.


Bryonia dioica est, comme son nom l'indique, dioïque; c'est à dire que les plants présentent des fleurs (jaunâtres ou verdâtres) en étoile soit mâles, soit femelles (il faut donc au minimum deux plantes pour espérer une fructification).


Andrena florea, Andrene de la Bryone, Poitiers quartier gare

L’Andrène de la bryone (Andrena florea), une abeille solitaire qui récolte exclusivement le pollen des Bryones pour garnir les cellules larvaires de son nid.


La racine et les fruits (des baies rouges à maturité) de Bryonia dioica sont très toxiques; ils étaient autrefois utilisés comme vomitifs en médecine populaire, non sans dangers. La médication consistait à laisser fondre un peu de sucre dans un trou creusé à même la racine charnue. Le sirop obtenu servait alors de puissant purgatif. Au 18ème siècle, le médecin botaniste français Jean Thore la surnommait «le médicament féroce»!


Bryonia dioica, Bryone dioïque, Poitiers Chilvert

Fruits (baies toxiques) de la Bryone dioïque, Poitiers quartier Chilvert


Bryonia dioica est vivace par sa grosse racine pivotante (ses parties aériennes disparaissent pendant l'hiver). La partie souterraine de la plante peut provoquer par simple contact cutané des irritations! On raconte cependant que pendant la Terreur (Révolution française), des fugitifs affamés la consommèrent en la râpant dans l'eau puis en la lavant abondamment; la recette reste périlleuse, et le résultat certainement peu agréable en bouche, d'où son surnom de Navet du diable.


Sorcière: la botaniste du Moyen Âge? Sauvages du Poitou!

- Mais peut être êtes vous un peu sorcière...

- Pourquoi dire cela ?

- Parce que vous m’avez ensorcelé.

(Sleepy hollow, Tim Burton)

Bryonia dioica était une habituée des grimoires de magie. On lui accordait des pouvoirs protecteurs et on la plantait autour des fermes pour protéger les cultures et les animaux domestiques. La racine de Bryonia dioica remplaçait parfois l'authentique Mandragore (Mandragora officinarum), plus difficile à dénicher, dans les chaudrons des sorcières...


Car il faut dire qu'à l'image de la Mandragore, la racine de Bryonia dioica est vaguement anthropomorphe. Il suffisait que la partie souterraine de la plante présente une forme munie d'un corps, de deux jambes et de deux bras pour enflammer les imaginations! Jusqu'à la fin du 19ème siècle, les guérisseurs ambulants ne manquaient pas d'afficher sur leurs étalages des racines de Bryonia dioica à silhouette humaine, parfois munies de sexes masculins ou de seins... Comme autant de signes attestant des pouvoirs magiques de la Sauvage.


Bryonia dioica, Bryone dioïque, Poitiers quartier Chilvert

Bryone dioïque, Poitiers quartier Chilvert


Pour aller plus loin :

- Identification assistée par ordinateur

- Bryonia dioica sur Tela-botanica

- Les vrilles de la Bryone, mode d'emploi sur le site Zoom Nature

- Le secret des vrilles de la Bryone sur le site Zoom Nature

- Les insectes de la Bryone sur le blog de Vincent Albouy


Bien que la Bryone dioïque soit toxique pour nombre d’espèces, la Coccinelle de la Bryone (Henosepilachna argus) en a fait son menu exclusif… A l’exception du sud de la France où l’insecte grignote aussi quelques cucurbitacées cultivées, ce qui lui vaut parfois le surnom de Coccinelle du melon. Le Navet du diable à la table d'une Bête à bon Dieu, quoi de plus normal finalement?

 

Renouée des oiseaux, la piétinée
Date 09/10/2015
Ico Villes, chemins & terrains vagues

Polygonum aviculare, Renouée des oiseaux, Poitiers quartier gare

Renouée des oiseaux, Poitiers quartier gare


Polygonum aviculare (Renouée des oiseaux ou Courée en poitevin saintongeais) appartient aux Polygonaceae, le clan des Renouées, du Sarrasin, des Rhubardes et autres Rumex. Les Polygonum (Renouées) tirent leur nom des termes grecs Polys «plusieurs» et Gonu «genoux»: leur tige solide est parcourue par de nombreux «nœuds». Il faudra bien se pencher pour observer ceux de Polygonum aviculare... la Sauvage est le plus souvent planquée sous nos chaussures!

- Bon dieu de merde tu me piétines la gueule.

- Ben excuse moi j’te croyais mort.

- Et ben tu t’es trompé, connard.

(Apocalypse Now, Francis Ford Coppola)

Polygonum aviculare, Renouée des oiseaux, Saint Benoît (86)

Sous les pneus des voitures en ville: petites feuilles ovales, elliptiques ou lancéolées

de la Renouée des oiseaux.


Polygonum aviculare est une herbe commune sur tout le globe. C'est la «mauvaise herbe» des chemins, des gazons usés, des terrains de jeux, celle qui perce entre deux pavés, dans les fissures du revêtement d'une cour ou d'un parking, autant de lieux fréquentés et de sols abîmés (nus et fortement tassés).


Polygonum aviculare, Renouée des oiseaux, Poitiers Chilvert

Fleur discrète à 5 tépales de la Renouée des oiseaux, Poitiers quartier Chilvert


Bien qu'annuelle (plus rarement pérennante), Polygonum aviculare avait tout pour devenir de la mauvaise graine: elle est capable de pousser dans des conditions misérables, sur des terres si dures qu'on aurait du mal à y planter une pioche, elle résiste aux piétinements, son mode de dispersion sur le territoire est efficace et ingénieux (voir plus bas)... Mais voilà, sa taille réduite ne cause guère d'inquiétudes et de considérations; ses fleurs blanches de quelques millimètres de diamètre ne marquent ni les regards (si ce n’est ceux des oiseaux), ni les butineurs (les fleurs s’autopollinisent).


Polygonum aviculare, Renouée des oiseaux, Poitiers centre ville

Renouée des oiseaux: l'art du micro carré potager sur macadam!


Les fruits (des akènes) pyramidaux de Polygonum aviculare font le régal des volatiles («aviculare» signifie oiseaux en latin). Les graines qui ne sont pas becquetées finissent collées sous les pattes des animaux ou sous les baskets des passants, qui disséminent malgré eux les générations suivantes. Enfin, la belle habille et protège les sols dégradés de l'érosion et de l'exposition directe au soleil par son couvert dense.


Polygonum aviculare, Renouée des oiseaux, Poitiers Chilvert

Renouée des oiseaux, l'amie de tous les oiseaux! Poitiers quartier Chilvert


Certains hommes avisés se sont quand même penché vers la Sauvage: il s'avère que Polygonum aviculare est comestible, pour nous comme pour les animaux (les fermiers la connaissent plus souvent sous le nom d'Herbe à cochon).


Mais c'est surtout grâce à son usage en médecine populaire que la sauvage a obtenu ses citations. La plante est tannique (asséchante), hémostatique (cicatrisante), riche en vitamine C et en flavonoïdes. Son infusion est réputée soulager les toux et les bronchites. Même si sa réputation subsiste (ses sommités fleuries sont inscrites à la liste A des plantes médicinales de la pharmacopée française), la médecine moderne montre moins d'enthousiasme à l'égard de la sauvageonne et les études à son sujet n’abondent guère.


Polygonum aviculare, Renouée des oiseaux, Chasseneuil-du-Poitou (86)

Renouée des oiseaux à la conquête de la misère, un tentacule après l'autre!

Et si la Sauvage ne vous convainc pas en tant que plante médecine, reste cette ancienne tradition vénitienne: pour prophétiser notre sort après le trépas, cueillir un brin de Renouée des oiseaux. En commençant par la pointe, compter chaque nœud jusqu'à la racine, en répétant tour à tour paradiso (paradis), purgatorio (purgatoire) et inferno (enfer)... Lorsqu'on arrive au dernier nœud, notre destin post mortem est fixé!


 Polygonum aviculare, Sauvages du Poitou


Pour aller plus loin:

- Polygonum aviculare: identification par ordinateur

- Polygonum aviculare sur Tela-botanica


Euphorbia prostrata, Euphorbe prostrée, Poitiers quartier Chilvert Euphorbia maculata, Euphorbe maculée, Saint-Sauvent (87)

Faute de se pencher suffisamment, on risque fort de confondre notre Renouée des oiseaux avec quelques Euphorbes au port rampant: à gauche, l'Euphorbe prostrée (Euphorbia prostrata) qui se distingue de par les poils de ses capsules répartis irrégulièrement. A droite, l’Euphorbe maculée (Euphorbia maculata) qui se distingue de par ses capsules pourvues d'une pilosité uniforme.

 

Renouée du japon, la terreur
Date 02/10/2015
Ico Grand banditisme (invasives)

Reynoutria japonica, Renouée du Japon, Poitiers quartier Chilvert

Renouée du Japon, Poitiers quartier Chilvert


Reynoutria japonica (Renouée du japon) appartient à la famille Polygonaceae, aux côtés des Sarrasin, Rhubarbes et autres Rumex. La Sauvage se dresse sur une tige solide parcourue de plusieurs «nœuds», signe distinctif des Renouées, qu'elles soient minuscules (Polygonum aviculare, la petite Renouée des oiseaux) ou géantes, comme la Renoué du Japon.


Pour le grand public, la désignation Renouée du Japon recouvre généralement trois plantes proches, assez difficiles à différencier: Renoutrya japonica (la Renouée du Japon à proprement parler, aux feuilles brusquement tronquées à la base et glabres à la face inférieure), Reynoutria sachalinensis (la Renouée de Sakhaline, plus rare, dont les feuilles, plus grandes, sont cordées à la base et possèdent quelques poils épars sur les nervures à la face inférieure) et Reynoutria x-bohemica (la Renouée de Bohême, une hybride des deux précédentes, très vigoureuse et compétitive). Les trois fausses jumelles ont des comportements semblables.


Reynoutria japonica, Renouée du Japon, Poitiers quartier gare
Feuilles tronquées de la Renouée du Japon (généralement à peine plus longues que larges).


Les grandes renouées sont d'excellentes comestibles. C'est d'ailleurs à ce titre qu'elles furent introduites en Europe, dès le moyen âge, depuis l'Asie (Chine, Corée, Japon et Sibérie). Capables de produire une biomasse importante en un temps record, elles ont tout le potentiel de bonnes fourragères (en pratique malheureusement, le bétail n'en raffole pas). L'homme préfère consommer les jeunes pousses ou l'extrémité des grandes tiges, cuites dans l'eau comme des asperges.


Reynoutria sp, Poitiers Chilvert

Jeune pousse d'une renouée géante, Poitiers quartier Chilvert


Les grandes renouées profitèrent d'une seconde vague d'importation vers l'Europe au 18ème siècle, sans doute pour leurs qualités ornementales: elles poussent haut et vite, avant d’agrémenter, à la fin de l'été, leurs massifs de fleurs blanches très mellifères (précieuses pour les insectes à l'approche de l'automne). L’espèce Reynoutria japonica ne dispose a priori pas de pieds mâles fertiles en France (des hybridations avec les autres renouées géantes, pour peu qu'elles se croisent sur un même territoire, restent possibles, pouvant aboutir à des spécimens fertiles).


Reynoutria japonica, Renouée du Japon, Poitiers bord de Clain

Fleurs de la Renouée du Japon en automne: un festin pour les diptères!


A ce point de l'article, on est en droit de se demander comment la Renouée du Japon a réussit à devenir l'archétype même de la plante invasive, et pourquoi la simple évocation de son nom cause des sueurs froides à ceux qui la côtoient de près... Car il se trouve que la Sauvage est aujourd'hui épinglée comme une véritable peste végétale, une terreur surveillée de très près par l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature!


Reynoutria japonica, Sauvages du Poitou


Comme on l'a vu, en Europe, Reynoutria japonica n'a guère pu compter sur la reproduction sexuée (via des fleurs) pour se propager. Sa survie et son développement repose donc sur son mode de reproduction végétatif... Et ce dernier s'avère d'une efficacité redoutable!

Reynoutria japonica est vivace, avec des rhizomes démesurés capables de s'enfoncer à 2m de profondeur et de s'étendre jusqu'à 7m autour d'un seul pied. Ses racines libèrent une toxine dans le sol, pénalisant toute vie végétale alentour, histoire de saper la concurrence. Si l'on tente de s'en débarrasser, il faut savoir que le moindre centimètre de rhizome oublié en terre donnera naissance à un nouveau plant... De plus, en milieu humide (bords de rivières), une tige emportée par le courant et laissée à même le sol suffit pour démarrer une bouture.


Le moins que l'on puisse dire, c'est que les colonies géantes de Reynoutria japonica imposent le respect. Fauchées aux pieds, elles sont capables de repartir de plus belles et ce en un temps record (les jeunes pousses peuvent atteindre 3m de hauteur en une seule saison), occupant un espace ahurissant et laissant tous les autres végétaux sur le carreau. Autant de paysages où la biodiversité est mise à mal.


Reynoutria japonica, Renouée du Japon, Poitiers bord de Clain

Feu d'artifice automnal de la Renouée du Japon


Les plus perspicaces se demanderont peut être: comment se fait-il qu'une plante présente sur le territoire depuis le Moyen-âge devienne brusquement, au 20ème siècle, une hors-la-loi incontrôlable? Qui a fâché Reynoutria japonica?


Répondre à cette question reste une affaire de spécialistes, mais on peut entendre aujourd'hui quelques pistes de réflexions intéressantes:


Revenons aux origines asiatiques de Reynoutria japonica: au Japon, la Sauvage habitait le plus souvent les flancs des volcans; autant dire des sols naturellement hostiles et perturbés. Reynoutria japonica est donc dès son berceau une plante coriace, élevée à la dure, qui se sent comme un pied dans une pantoufle sur les sols métallifères. Les pollutions industrielles qu’elle tolère ont favorisé l'expansion de la sauvage en milieu urbain (et au-delà depuis) en pénalisant ses concurrentes. Mais surtout, les travaux de terrassement autour des villes ont boosté sa propagation : rien de tel que quelques coups de pelleteuses dans ses rhizomes pour la disperser. Aujourd'hui, Reynoutria japonica est devenue, à force de voyages et surtout à force de côtoyer l'homme, une invasive avec laquelle il convient de faire preuve d'humilité et de la plus grande vigilance.


Reynoutria japonica, Renouée du Japon, Poitiers quartier Chilvert
Tige densément tachée de rouge (parfois complètement rouge) de la Renouée du Japon.

Addenda (février 2016): les scientifiques anglais terminent cette année un programme de recherche démarré en 2004, qui vise à tester l'introduction de prédateurs naturels de la Renouée du Japon en Europe (sur son aire d'origine, l'expansion de la Sauvage est naturellement contrôlée par la faune autochtone). Un psylle (sorte de petite cigale), Aphalara itadori, présente des résultats très prometteurs; tout laisse à penser que son introduction sera validée puis généralisée sous peu. (source: La Garance voyageuse, N°112)


Pour aller plus loin:

- Identification assistée par ordinateur

- Reynoutria japonica sur Tela-botanica

- Une recette de cuisine originale pour (essayer de) se réconcilier avec la Sauvage!

 

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