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Drave de printemps: la prophétie des beaux jours
Date 09/03/2017
Ico Murs et rocailles

Draba verna, Drave de printemps, Poitiers quartier Chilvert

Drave de printemps, Poitiers quartier Chilvert


Draba verna (Drave de printemps) appartient à la famille Brassicaceae (ex Crucifères), dont les membres présentent des fleurs à quatre pétales «en croix». En la croisant sur le trottoir, on pensera immédiatement à ses sœurs les plus urbaines: Cardamine hérissée (Cardamine hirsuta), Capselle bourse à Pasteur (Capsella bursa-pastoris) ou Arabette des dames (Arabidopsis thaliana)...


Hirondelle, Drave de printemps, Spring is coming!

- À quand le printemps a votre avis?

- Je le prédis pour le 21 Mars.

- Ha ha, oui, ça serait chouette!

(Un Jour sans fin, Harold Ramis)

Draba verna est aux vieux murs, aux pelouses rases et aux trottoirs ce que les hirondelles sont au ciel: l'annonciatrice du retour du printemps. Ses grappes de fleurs éphémères s'observent entre la fin de l'hiver et le mois d'avril. Mais cette prophète des beaux jours reste bien discrète et on risque fort de lui marcher dessus avant que de l'entendre: Draba verna est une des Sauvages les plus précoces de nos villes, mais aussi une des plus petites (une dizaine de centimètres pour les spécimens les plus costauds)!


Draba verna, Drave de printemps, Poitiers bords de Boivre

Drave party sur les gravillons ! (Drave de Printemps, Poitiers bords de Boivre)


Un examen superficiel pourrait laisser penser que les minuscules fleurs blanches de Draba verna affichent huit pétales. Il n'en est rien: la Sauvage fait honneur aux armoiries de son clan en brandissant quatre pétales seulement, mais si profondément échancrés qu'ils semblent doublés. Reste à attendre une éclaircie pour observer ses atouts, les fleurs ne s'ouvrant qu'en présence d'un ciel lumineux et sans nuages.


Draba verna, Drave de printemps, Poitiers Rochers du Porteau

Fruits ovales et fleurs de la Drave de Printemps: 4 pétales profondément échancrés, 6 étamines autour du pistil au centre.


Draba verna réserve souvent des surprises à ses observateurs. Polymorphe, la belle présente des variations (pilosité, taille des fleurs...) d'une localité à une autre, pouvant laisser croire aux botanistes les plus aguerris qu'ils viennent peut-être de dénicher le Saint Graal du macadam: une nouvelle espèce! Le piège est redoutable même sous les microscopes, certaines populations pouvant afficher leurs différences jusque dans le décompte de leurs chromosomes.


Draba verna, Drave de printemps, Poitiers Chilvert

Feuilles spatulées de la Drave de printemps en rosette (jamais de feuilles caulinaires).


Il faut dire que la Sauvage dispose de peu de temps pour tenter de se reproduire, l'univers minéral qu'elle fréquente devenant un enfer aride dès la fin de sa première saison. Annuelle trop précoce pour pouvoir compter sur les butineurs, Draba verna est une Sauvages autogame qui assure toute seule sa pollinisation en un temps record (la plante est capable de se féconder elle même). Ses parties aériennes disparaitront complètement avant l'arrivée de l'été.


La variabilité de ses populations repose plus sur d'éventuelles mutations que sur le brassage génétique entre individus, ce qui peut expliquer pourquoi ses populations semblent «fixer» localement leurs spécificités avec le temps, telles de nouvelles espèces (les mutations pertinentes vis-à-vis du milieu risquant moins de se diluer au fil des générations que dans le jeu des croisements).

La mutation, c’est la clé de notre évolution. C’est elle qui nous a mené de l’état de simple cellule à l’espèce dominante sur notre planète!

(X-Men, Bryan Singe)

Alexis Jordan, botaniste lyonnais du 19ème siècle, collectionna dans son jardin des spécimens de Draba verna issus d'horizons variés. Après 30 années de culture, il dénombrait pas moins de 200 groupes différents pouvant répondre à la définition d’espèce (des groupes d'individus interféconds entre eux et morphologiquement proche mais peu enclins à se reproduire avec les membres des autres groupes). Nul doute que la Sauvage n'a pas fini d'alimenter les débats universitaires et botaniques.


Mais plutôt que de couper les tiges en quatre, retenons que chaque plante est unique et mérite qu'on lui prête notre attention!


Chaque Sauvage est unique! Sauvages du Poitou


Draba verna, Drave de printemps, Poitiers Chilvert

Les fruits (siliques courtes ou «silicules») de la Drave de printemps, guère plus impressionnants que les capsules d'une mousse! Le vent se chargera de disperser les minuscules graines...


Malgré sa discrétion, Draba verna est bien présente sur les cinq continents habités. Nommée Whitlowgrass par les anglophones à cause des adorables tapis formés par ses colonies (littéralement «la petite herbe blanche»), la Sauvage chante le printemps dans toutes les langues, tout autour du globe.


Draba muralis, Drave des murailles, Poitiers quartier Chilvert

Une autre Drave qui fréquente les lieux secs, les rochers et les trottoirs, la Drave des murailles (Draba muralis). Elle se distingue avec ses feuilles dentées, les caulinaires embrassant la tige avec leurs oreillettes arrondies.

Pour aller plus loin:

- Draba verna: identification assistée par ordinateur

- Draba verna sur Tela-botanica

- La théorie de la mutation et les travaux d'Alexis Jordan par Hector Lebrun

- Draba muralis sur Tela-Botanica


Draba verna par Marie Corneille,1889

Drave de Printemps représentée à l'échelle par Marie Corneille, artiste et botaniste des Deux-Sèvres (1889)... Un travail de fourmi! Une planche dénichée parmi les trésors du Fonds ancien de la bibliothèque universitaire de Poitiers.


Le printemps, c'est maintenant avec Sauvages du Poitou!

 

Petite Pervenche, la madeleine de Rousseau
Date 27/02/2017
Ico Haies & forêts

Vinca minor, Petite Pervenche, Poitiers bords de Boivre

Petite Pervenche, Biard (86) bords de Boivre


Vinca minor (Petite pervenche, Violette de serpent ou Feuilles-douces en poitevin-saintongeais) appartient au clan cosmopolite Apocynaceae, dont certains membres connaissent un franc succès dans les jardins et serres d'ornement: Laurier rose (Nerium oleander), Frangipaniers (Plumeria sp.) et autres Roses du désert (Adenium obesum)... La Petite Pervenche n'est pas en reste: le tapis de son feuillage persistant est un grand classique des massifs ombragés. Elle doit d'ailleurs son nom triomphant (Vinco est «vaincre» en latin) à ses feuilles toujours vertes, quelle que soit la saison.

La victoire appartient à celui qui y croit le plus et surtout le plus longtemps.

(Pearl Harbor, Michael Bay)

Vinca minor, Petite Pervenche, Ligugé (86)

La Petite Pervenche dresse ses feuilles glabres, coriaces et luisantes.


Devant sa floraison précoce et printanière, un ami me confia un jour que la belle ressemblait plus à «une gentille fleur de grand-mère» qu'à une hors-la-loi du Grand Ouest. L'aura de tendresse de Vinca minor évoque pour beaucoup les jardins fleuris de l'enfance. Dans ses Confessions, Jean-Jacques Rousseau en fait même sa «madeleine de Proust» avant l'heure, la Sauvage lui évoquant le souvenir de ses toutes premières leçons de botanique prodiguées par Madame de Warens, sa tutrice:

"Trente ans se sont passés sans que j'aie revu de la Pervenche, ou que j'y aie fait attention. En 1764 (...), nous montions une petite montagne (...). Je commençais alors d'herboriser un peu. En montant et regardant parmi les buissons je pousse un cri de joie! Ah voilà de la pervenche! Et c'en étoit en effet."

La Pervenche de Rousseau, Sauvages du Poitou!


En milieu naturel, les colonies de notre «gentille» Sauvage peuvent marquer les lieux autrefois habités par l'homme: Vinca minor est une plante intéressante pour les archéologues en herbe (à l'image de la Mélisse officinale), indiquant à l'occasion l'emplacement d'anciens sites gaulois ou mérovingiens. Il faut dire qu'une fois installée quelque part, Vinca minor peut subsister pendant des siècles: vivace très rustique, elle drageonne efficacement et ses longues tiges rampantes (jusqu'à 2m de longueur) marcottent naturellement. En milieu forestier, la Sauvage ne compte guère que sur la reproduction végétative, sa floraison restant timide et sa fructification rare. Elle profitera de lumière dégagée lors des coupes de bois pour s'exprimer plus ostensiblement.


Pourtant, sur les sols frais et riches en humus, ses feuilles coriaces peuvent former de vastes tapis en toute saison qui n'ont rien à envier à ceux du Lierre grimpant, c'est dire! Dans son Encyclopédie des plantes bio-indicatrices (vol. 3), Gérard Ducerf remarque:

"Elle peut subsister très longtemps, des années, des siècle, là où elle a été plantée, sans jamais devenir envahissante."

Loin de moi l'idée de contredire les travaux du botaniste, ni de traiter d'envahissante notre tendre fleur, mais force est de constater que la Sauvage peut coloniser à elle seule des zones très étendues! Même si elle n'a rien d'une conquérante: ses faibles capacités de reproduction sexuée n'aident pas à la dispersion de ses colonies en sous bois et les jardiniers parviennent sans trop de peine à freiner ses ardeurs dans leurs massifs.


Vinca minor, Petite Pervenche, Poitiers bords de Boivre

Petite Pervenche à perte de vue!

Elle a les yeux bleus comme du canard WC.

(Les Beaux Gosses, Riad Sattouf)

On croise le plus souvent deux Pervenches très proches l'une de l'autre, la petite et la grande. Si la Petite Pervenche (Vinca minor) recherche la fraîcheur sous-bois, la Grande Pervenche (Vinca major) supporte d'avantage les terres sèches et les rayons du soleil. La Grande Pervenche présentent des fleurs et des feuilles un peu plus larges. C'est leur calice qui nous permettra de différencier les deux sœurs avec assurance: les sépales sont courts chez la Petite Pervenche, longs chez la Grande Pervenche.


Vinca minor, Petite Pervenche, Poitiers bords de Boivre Vinca major, Grande Pervenche, Poitiers bords de Boivre

Sépales courts pour la Petite Pervenche (à gauche), longs pour la Grande Pervenche (à droite)


Comme le Laurier rose (Nerium oleander), son cousin domestiqué, Vinca minor est toxique de par les alcaloïdes présents dans ses feuilles. La Sauvage, alors plus connue sous le nom de «Violette de sorciers», n'en fut pas moins recherchée par le passé: elle entrait dans la composition des philtres d'amour au Moyen-âge (la faute à ses longues tiges en lasso qui «attachent» les amoureux?), puis fut pendant longtemps prescrite dans le traitement des maladies pulmonaires. Entre des mains expertes, Vinca minor est utilisée de nos jours dans le traitement de troubles neurologiques, la vincamine extraite des ses feuilles permettant de favoriser l’oxygénation et l'afflux sanguin au cerveau.


Retenons enfin que la Petite Pervenche fut longtemps liée aux rites funéraires: les lianes de la «Violette des morts» (un autre de ses surnoms) couronnaient les défunts ou décoraient les tombes au Moyen-âge... Qui sait, la Sauvage exprimait peut-être déjà de tendres souvenirs, telle une boite de «madeleines de Rousseau» déposée sur la sépulture d'un être cher?


Pour aller plus loin:

- Identification assistée par ordinateur

- Vinca minor sur Tela-botanica

- Usage médical de la Petite Pervenche à travers l'histoire sur le blog Books of Dante

 

Valériane officinale: l'Herbe aux chats-rats-vers
Date 13/02/2017
Ico Zone humide

Valériane officinale, Valeriana officinalis, Poitiers bords de Clain

Valériane officinale, Poitiers bords de Clain


Valeriana officinalis (Valériane officinale ou Ervant en poitevin-saintongeais) appartient à la famille Caprifoliaceae, parmi laquelle on trouve la Centranthe rouge ou la Cardère sauvage déjà rencontrées dans nos pages. La Sauvage doit son nom au latin valere, «bien se porter», non pas tant pour sa vigueur que pour son statut de légende parmi les plantes médicinales: jadis, Valeriana officinalis fut même surnommée Herbe-guérit-tout!

- Ce doit être absolument incurable et mortel!
- Mais non, mais non...
- Ah? Il y a un espoir de guérison? Ne me trompez pas docteur je veux savoir la vérité!
(Knock, Guy Lefranc)

Tout à tour philtre d'amour, aphrodisiaque, remède contre l'épilepsie, l'hystérie, la danse de Saint-Guy, l'asthme... L'utilisation médicale de Valeriana officinalis se précise et se recentre au fil des siècles autour de son action calmante et sédative (ce sont ses parties souterraines qui sont utilisées, généralement en tisane ou en lotion relaxante). Aujourd'hui, l'efficacité de Valeriana officinalis est contestée par les scientifiques, les essais cliniques à son sujet aboutissant à des résultats irréguliers et contradictoires. Son usage reste néanmoins répandu et apprécié: il n'est pas rare de retrouver la Sauvage dans les cocktails phytos des sachets de tisane «Bonne nuit»! La Valériane officinale est largement cultivée à des fins commerciales, la plus grosse partie de la production française se situant en Anjou.


Valériane officinale, Poitiers bords de Clain

Fleurs rosées de la Valériane officinale: une corolle en tube, 3 étamines autour d'un pistil surmonté de 3 stigmates.


Mais revenons à nos spécimens sauvages: Valeriana officinalis est une vivace qui fréquente les sols riches engorgés d'eau des prairies et des clairières alluviales. Elle dresse en été ses corymbes amples de fleurs rosées, au bout de longues tiges (plus de 1m de hauteur) creuses et cannelées.


Valériane officinale, Poitiers bords de Clain

Feuilles opposées et pennatiséquées de la Valériane officinale (la tige est creuse et cannelée).


Valeriana officinalis présente des aspects variables selon les régions, les milieux ou selon ses stades de développement. Elle peut être grêle en terrain sec ou robuste sur sol humide; généralement glabrescente, elle peut aussi se montrer très poilue... À tel point que de nombreuses sous espèces sont aujourd'hui recensées, voir de nouvelles espèces, ce qui cause parfois aux botanistes quelques nuits blanches, sapant un peu plus la réputation de somnifère de la Sauvage! Malgré leurs différences, tous ces spécimens conservent les qualités alimentaires (elles sont comestibles), médicinales et bio-indicatrices précitées.


Les fruits de Valeriana officinalis sont de petits akènes que le vent disperse (anémochorie), aux «plumes» finement découpées.


Valériane officinale, Poitiers bords de Clain

Akènes de la Valériane officinale en été.


Nous avions déjà évoqué l'effet attractif et euphorisant que produisent les effluves des racines des Valérianes chez les chats (voir Centranthus ruber, la Valériane rouge); c'est aussi le cas pour Valeriana officinalis, surnommée à l'occasion Herbe aux chats. Certains jardins botaniques cultivent leurs pieds de Valériane sous un grillage pour éviter que les félins accrocs ne les déterrent!


Les rats se passionneraient aussi pour la Sauvage. Vous connaissez l'histoire du joueur de flûte de Hamelin: le musicien libéra sa ville d'une invasion de rats en entrainant les rongeurs jusque dans une rivière, où ils se noyèrent. Selon la légende, le musicien tirait ses pouvoirs de sa flûte. Dans d'autres versions, on raconte que le musicien cachait dans ses poches quelques plantes pour appâter les rongeurs: Valériane?


Valeriana officinalis et le Joueur de flûte de Hamelin, Sauvages du Poitou!


Enfin, certains jardiniers pulvérisent des purins ou des infusions de Valeriana officinalis (diluées au 1/20) sur leurs planches ou sur leur compost pour encourager la présence de vers de terre. Si quelqu'un est à même de m'expliquer le pourquoi du comment en commentaire, j'en serais ravi. L'occasion de rappeler le rôle essentiel de ces ouvriers invisibles: les vers de terre recyclent, compostent, retournent, aèrent et fertilisent le sol. Les «turricules», leurs déjections, sont très riches en azote, en phosphore, en potassium, en calcaire, en magnésium. Quoi qu'il en soit, les préparations à base de Valeriana officinalis sont elles aussi riches en phosphore et donc intéressantes pour la croissance et la floraison de certaines plantes au jardin.


Turricule en hiver: le ver Noël est passé au jardin, ho ho ho!


Pour aller plus loin:

- Valeriana officinalis sur Tela-botanica

- Valériana officinalis: identification assistée par ordinateur

- La Valériane à travers l'histoire sur le blog Books of Dante

- Données pharmacologiques sur l’utilisation de la Valériane dans les troubles du sommeil de El Ouazani Mehdi


Valériane officinale, Poitiers bords de Clain

Valériane officinale, Poitiers bords de Clain

 

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