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Vocabulaire de la botanique (8) : des fruits, des pommes, des poires et des scoubidous!
Date 14/10/2018
Ico Initiation à la botanique joyeuse!

Des fruits et des faux fruits sur Sauvages du Poitou!


Forts de notre vocabulaire permettant de décrire les feuilles simples ou composées, leur disposition sur la tige, les fleurs régulières, irrégulières et leur agencement (inflorescences), nous sommes fin prêts à aborder l'automne, saison des fruits s'il en est une. Si les fleurs l'emportent généralement dans le cœur des promeneurs, les fruits qui leurs succèdent n'en sont pas moins pourvus d'élégance ou d'ingéniosité: souvenez-vous de notre comédie musicale consacrée aux grand voyage des semences, où il était question des milles et une ruses inventées par les Sauvages pour propulser leurs graines vers de nouveaux horizons.

Au jour, on est partis chez moi discuter de l'amour et des fruits (...)

Des pommes, des poires et des scoubidoubi-ou ah!

(Des pommes des poires, Sacha Distel)

En botanique, le fruit est un organe végétal contenant une ou plusieurs graines. Il est issu de la transformation du pistil - c'est à dire du (ou des) carpelle(s) - après la fécondation des ovules. Souvenez-vous de notre fleur «vraie»: après fécondation, les ovules deviennent des graines alors que les parois carpellaires deviennent l'enveloppe protectrice des graines qu'on appelle péricarpe. Considérons une cerise:


La Cerise, un fruit simple... Sauvages du Poitou!


Si la cerise est un fruit simple (ce qui n'enlève rien à ses qualités), la métamorphose d'autres fruits peut-être plus tarabiscotée. Ainsi, chez la fraise, la partie charnue est issue de la transformation du réceptacle floral. Les petits points jaunes à sa surface correspondent à chaque carpelle et sont pour ainsi dire les véritables fruits... Pour la fraise, on parle de «faux fruit», car ce qu'on considère communément comme étant le fruit ne résulte pas seulement de la transformation du pistil.


Fraise: vrai fruit ou faux fruit? Sauvages du Poitou!


Coupons maintenant les cheveux en quatre, ou plus exactement une pomme en deux. La partie que l'on croque se compose de l'ancien réceptacle floral ET de la paroi carpellaire, formant ensemble une masse charnue continue.


Mangez des pommes avec Sauvages du Poitou!


Le péricarpe (l'ensemble de l'enveloppe protectrice des graines) est toujours formé de trois couches distinctes. Dans le cas de cette pomme, la première couche est la peau à l'extérieure, ou épicarpe. La seconde est la partie médiane charnue, ou mésocarpe. Enfin, au cœur, l'endocarpe cartilagineux délimite les loges qui renferment les graines.


Vous frôlez la compotée de méninges? Ce vocabulaire de base nous sera pourtant très utile pour définir les fruits. Retenons aussi que de nombreux scénarios sont possibles: il arrive même que des parties de la fleur soient recyclées en des gadgets surprenants. Par exemple, chaque style des fleurs de la Clématite vigne blanche (Clematis vitalba) devient un appendice plumeux qui permettra au fruit de voyager avec le vent (anémochorie).


Clematis vitalba, Clématite vigne blanche, Vouneuil-sous-Biard (86)

La crête iroquoise des akènes plumeux de la Clématite vigne blanche


Mais laissons pour l'heure le récit de ces incroyables métamorphoses pour observer quelques spécimens sauvages sur le terrain. On distingue deux grands types de fruits: les fruits charnus et les fruits secs.


Les fruits charnus, Sauvages du Poitou!


Les fruits charnus sont de deux sortes: les drupes et les baies. C'est la qualité de l'endocarpe, la couche la plus proche de la graine, qui nous permet de distinguer l'une de l'autre. Si l'endocarpe est dur, autrement dit si un noyau protège les graines, c'est une drupe (cerise, olive, noix...). A l'inverse, si l'endocarpe est tendre, autrement dit si la graine est directement en contact avec la partie charnue, c'est une baie (tomate, raisin, concombre...).


Prunus spinosa, Prunellier, Biard (86) Arum italicum, Gouet d'Italie, Poitiers bords de Boivre

Drupes du Prunellier (Prunus spinosa) à gauche versus baies toxiques du Gouet d'Italie (Arum italicum) à droite.


A moins d'autopsier minutieusement les fruits, la distinction n'est pas toujours pas évidente... De plus, certains spécimens viennent compliquer l'examen. Une datte ou un avocat, pour les exemples les plus connus, ne possèdent pas de noyau, mais une grosse graine très dure: ce sont des baies. Une mûre est composée d'un amas de petits «fruits» contenant un minuscule noyau (suffisamment gros pour se coincer dans nos dents). On parle dans ce cas d'un amas de drupes, ou plus exactement de polydrupe.


Rubus sp, Ronce, Poitiers quartier Chilvert

Fruit de la Ronce (Rubus sp): une polydrupe... La mûre (l'amour?) est plus fort que tout!


Intéressons-nous maintenant aux fruits secs; pas tant les raisins ou les bananes séchées que vous cachez dans votre besace, mais aux fruits dont le péricarpe est constitué de tissus durs et minces. Là aussi, on distingue deux sortes de fruits secs: les fruits secs déhiscents et les fruits secs indéhiscents.


Fruits secs, Sauvages du Poitou!


Les fruits secs déhiscents sont des fruits secs qui s'ouvrent spontanément pour libérer leurs graines, avant même d'être tombé sur le sol. La palette des possibilités est riche, on ne donnera ici que quelques exemples courants:


Coronille changeante, Coronilla varia, Buxerolles (86)

La gousse (que les botanistes appellent aussi «légume», ça se complique sur la carte du menu) est typique des «légumineuses» et s'ouvre par deux fentes de chaque côté. Ici les gousses toxiques de la Coronille changeante (Coronilla varia).


Helleborus foetidus, Hellébore fétide, Poitiers bords de Boivre

Le follicule, qui ne s'ouvre que par une seule fente. Ici, les follicules de l’Hellébore fétide (Helleborus foetidus).


Enfin, la capsule qui s'ouvre selon des fentes (ou des dents, des pores, des clapets, des couvercles...) multiples, spécifiques et/ou successives... A titre d'exemple et pour faire court - les capsules mériteraient un article à elles seules - ne citons ici que la modalité d'ouverture la plus courante chez les capsules des Brassicacées, nommées siliques.


Le silique, Sauvages du Poitou
(1) Au cœur de l'ovaire, une loge unique renferme les graines. (2) Pendant la maturation du fruit, une cloison se forme, délimitant deux loges distinctes. (3) Les parois externes se fendent et se soulèvent progressivement, du bas vers le haut, puis se détachent. (4) Reste la cloison qui porte les graines. Ces dernières ne tardent pas à se disperser.

Alliaria petiolata, Alliaire, Poitiers bords de Boivre
Silique de l'Alliaire (Alliaria petiolata)

De l'autre côté, les fruits secs indéhiscents sont des fruits secs qui ne s'ouvrent pas spontanément pour libérer leurs graines. Il faudra donc que l'embryon de la plante déchire son enveloppe en germant ou que l'enveloppe se décompose. Le plus grand représentant des fruits secs indéhiscents est l'akène, qui est constitué d'une graine unique (on parlera plutôt de caryopse chez les Poacées).


Chez les Astéracées, l’akène est souvent équipé de soies (réunies en un bouquet nommé aigrette) permettant aux semences de voler. Le fruit étant un critère d’identification important, il n’est pas rare de lire dans les flores des descriptifs poussés sur leur aspect: sont-ils lisses, ridés, glabres, pubescents…? De même, on peut dépeindre avec précision jusqu’aux soies d’un akène volant: sont-elles lisses, denticulées, plumeuses (hérissées de poils fins)…?


Akènes des Asteracées au jardin, Sauvages du Poitou!

Observons quelques akènes pris au piège dans une toile d'araignée au jardin... de haut en bas et de gauche à droite: plumeux pour la Picride éperviaire (Picris hieracioides) / Rougeâtres, surmontés d'un long pied qui porte les soies plumeuses pour la Picride fausse viéprine (Helminthotheca echioides) / Ovales, écrasés et surmontés de plusieurs rangées de soies lisses pour le Laiteron potager (Sonchus oleraceus) / Allongés avec un sommet épineux, surmontés d'un long pied qui porte les soies lisses pour le roi Pissenlit (Taraxacum sect. Ruderalia).


Acer platanoides, Erable plane, Sauvages du Poitou!

Lorsque l'akène porte une grosse aile membraneuse (formée par le péricarpe), on parle de samare. Ici, on s'marre avec les samares de l’Érable plane (Acer platanoides)!

Malva sylvestris, Grande Mauve, Poitiers quartier Chilvert
Enfin, lorsque le fruit est réuni plusieurs loges contenant chacune une graine, qui se séparent à maturité en autant d'akènes, on parle de schizocarpe. Ainsi, le fruit des Ombellifères se divise en deux akènes à maturité (diakène), celui des Lamiacées ou des Boraginacées en quatre (tétrakène)... Ici, le schizocarpe de la Grande Mauve (Malva sylvestris) qui ressemble à un fromage dont chaque portion est un akène.

Reste à prendre son temps pour assimiler ce vocable fourni (qui est pourtant loin d'être exhaustif en la matière). Les fruits nous ouvrent un festival méconnu, spectaculaire, à l'heure où la plupart des fleurs ont quitté la scène... Ainsi parés, il n'y a plus guère le temps de s'ennuyer, et mille raisons de battre la campagne, quelle que soit la saison. Belle exploration!

D'autres leçons de botanique sur Sauvages du Poitou:
- Le vocabulaire de la botanique : les feuilles, première leçon
- Le vocabulaire de la botanique : les fleurs, première leçon
- Le vocabulaire de la botanique : les bourgeons
- Le vocabulaire de la botanique : racines et rhizomes
- Le grand voyage des Sauvages (dissémination des graines)

Pour aller plus loin:

- Le fruit sur Wikipedia

- Les différents types de fruits sur le site de l'université de la Sorbonne

- Les différents type de fruits sur le site Floranet

 

Vocabulaire de la botanique (5): fleurs irrégulières
Date 20/10/2017
Ico Initiation à la botanique joyeuse!

Bouquet de fleurs sauvages zygomorphes du Poitou!

Bouquet de fleurs sauvages zygomorphes du Poitou!

(Dans l'ordre: Lamier jaune, Vesce cultivée, Aristoloche clématite, Orchis bouc, Orobanche, Orchis vert, Violette odorante, Lamier pourpre et Euphraise raide)


Après l'article consacré aux fleurs régulières (les fleurs en tout point symétriques par rapport à leur centre, de forme «classique» et circulaire en somme), il est temps de se pencher vers des spécimens d'apparence plus excentrique: les fleurs irrégulières (ou «zygomorphes») qui apportent avec leurs silhouettes alambiquées un cortège de nouveaux mots. On peut dégager quelques clans de Sauvages emblématiques (mais pas exclusifs) au sein de ce courant botanico-artistique.

On dirait un Picasso période déstructurée!

(Sacré Robin des Bois, Mel Brooks)

Les fleurs irrégulières, Sauvages du Poitou!




La famille Fabaceae (où se côtoient des célébrités telles que les Fèves, Pois, Haricots, Trèfles, Luzernes, Vesces, Gesses...) est une des plus riches en matière de fleurs irrégulières. Et plus particulièrement ses membres qualifiés de «Papilionacés»: c'est dans les filets des amateurs de papillons, mais surtout au fond des cales des voiliers de plaisance (Hisse et ho!) qu'on va attraper les mots nous permettant de décrire leur cinq pétales.


La fleur papilionacée, Sauvages du Poitou

Étendard : le pétale supérieur, généralement le plus large.

Ailes : les deux pétales latéraux.

Carène : ensemble des deux pétales inférieurs.

Cytisus scoparius, Genêt à balais, Biard (86)


Les fleurs jaunes vif d'un Genêt à balais (Cytisus scoparius) s’avèrent très pédagogique: on observe sans peine l’étendard au-dessus, de même que les deux ailes disposées de chaque côté de la carène (la carène est en fait composée de deux pétales soudés entre eux).


Leptidea sinapis sur Lotus corniculatus, Biard (86)


L’Argus bleu (Polyommatus icarus) face au Lotier corniculé (Lotus corniculatus): un papillon et une Papillonacée, deux amis forcément inséparables! Le large étendard du Lotier corniculé, bombé vers l’avant comme s’il avait le vent dans le dos, surplombe les deux ailes. Les ailes recouvrent et cachent une carène fortement coudée, comme une petite corne. C’est peut-être de là que la sauvage tire son nom, corniculatus étant la corne en latin.



T’es mal placé dans la chaîne alimentaire pour faire ta grande gueule!

(L’âge de glace, Chris Wedge et Carlos Saldanha)

Du côté des Lamiaceae (anciennement «Labiées»), représentées par les Menthes, Mélisses, Thyms, Romarins, ou Origans, on puise l'inspiration dans la mythologie grecque: la jeune et séduisante Lamia était l'amante de Zeus. Un jour, la femme du Dieu, Héra la jalouse, tua leur enfant illégitime. Lamia, inconsolable, décida qu'aucune mère n'avait le droit d'être heureuse, et se transforma en un monstre qui mangeait les enfants des autres! Ainsi, les fleurs des Lamiaceae qui évoquent une gueule ouverte doivent leur nom à la terrible ogresse... Leurs pétales deviennent tout naturellement des «lèvres».


Lamiaceae...? Sauvages du Poitou!


Les lèvres se présentent toujours deux par deux: une supérieure et une inférieure (quoi de plus normal pour une bouche). Quant à l'entrée du tube formé par la corolle, elle est désignée comme étant... «La gorge»!


Rosmarinus officinalis, Romarin officinal, Poitiers Chilvert


Fleurs du Romarin officinal (Rosmarinus officinalis): la lèvre supérieure de la corolle forme une sorte de «casque» fendu (on appelle «casque» un sépale ou un pétale supérieur recourbé vers l'avant). La lèvre inférieure possède trois lobes, le central plus large et concave: c'est la «piste d'atterrissage» pour les butineurs.


Melittis melissophyllum, Mélitte à feuilles de mélisse, Poitiers bords de Boivre


Fleurs de la Mélitte à feuilles de mélisse (Melittis melissophyllum): Les grandes corolles blanche ou roses de la Mélitte à feuilles de mélisse — une forestière qui fleurit entre mai et juillet — sont composées d’un tube très saillant, à gorge très élargie. La lèvre supérieure, un peu concave, est entière. La lèvre inférieure se découpe en trois lobes étalés : deux lobes latéraux et un grand lobe médian plus foncé, comme une grosse langue pendante. Bien souvent, c’est la première chose qui nous frappe lorsqu’on rencontre une Lamiacée en fleur : elle nous tire la langue !


Les fleurs zygomorphes des Lamiacées cachent parfois des mécanismes complexes, destinés à favoriser leur reproduction. Ainsi, les butineurs qui s'engouffrent dans les corolles de la Sauge des prés (Salvia pratensis) s'opposent à des «barreaux» qui barrent l'accès au nectar. En forçant le passage, le butineur enclenche une mécanique de contrepoids qui fait pivoter des étamines vers le bas, jusqu'à ce que leur anthère touche le dos de l'insecte pour y déposer le pollen.

Salvia pratensis, Sauvages du Poitou!

Les épaules ainsi saupoudrées, le butineur s'envole vers d'autres fleurs où son dos caressera la «langue de serpent» qui surplombe la fleur, en fait le style recourbé d'un pistil à maturité... Ingénieuse nature!


Salvia pratensis, Sauge des prés, Chezeau (86)

Sauge des prés et butineur, Chezeau (86)



Je suis un artiste et mon œuvre c’est moi.

(Hell, Bruno Chiche)

Les Orchidées (Orchidaceae) constituent une grande famille éclectique et c'est probablement en son sein qu'on trouve les artistes les plus perchés! Si le vocabulaire qui permet d'observer leurs chefs d’œuvres devient un poil plus hermétique, le piège réside surtout dans la ressemblance entre pétales et sépales (certains auteurs préfèrent même parler de six tépales), tous richement colorés. Disons qu'une fleur d'Orchidée présente généralement une structure à trois sépales (une première couronne extérieure) et trois pétales (une seconde couronne intérieure), disposés autour d'une pièce centrale nommée «colonne» qui regroupe les organes sexuels de la plante. Plongeons du côté obscur de la botanique:


Fleur de l'orchidée, Sauvages du Poitou!


Le sépale dorsal et les deux pétales latéraux convergent souvent pour former un «casque» protecteur au-dessus de la colonne. L'élément le plus spectaculaire est le pétale inférieur qui sert d'appât et de piste atterrissage pour les butineurs: on nomme celui-ci «labelle». Ce dernier est parfois prolongé d'un éperon vers l'arrière.


Anacamptis morio, Orchis bouffon, Biard Petit Mazay (86)


Fleurs l'Orchis bouffon (Anacamptis morio): les trois sépales et les deux pétales latéraux, nettement striés, forment un «casque» qui protège la colonne. Le labelle, plus large que long, est maculé en son centre, divisé en trois lobes (les lobes latéraux sont crénelés) et prolongé à l’arrière par un éperon. C'est généralement une offrande de nectar qui permet aux sauvages d'attirer les butineurs dans leurs fleurs; l’éperon peut en constituer la réserve. Mais chez la plupart des Orchidées, l’éperon n’est qu’un leurre dénué de récompense. Ainsi, notre Orchis bouffon n’a rien d’autre à offrir à ses visiteurs que de belles promesses dans un emballage trompeur.


Les Orchidées usent de nombreux subterfuges de ce genre pour attirer les pollinisateurs. Chez les Ophrys par exemple, le labelle s'est transformé au fil de l'évolution en une imitation de la seule chose qui compte plus qu'un festin aux yeux d'un insecte: un partenaire pour la reproduction. 


Ophrys apifera, Ophrys abeille, Biard (86)


Ainsi chez l’Ophrys abeille (Ophrys apifera), les trois sépales très étalés sont généralement roses. Les deux pétales latéraux sont très courts, disposés au-dessus du labelle. Ce dernier est trilobé, brun-rouge, dépourvu d’éperon, flanqué d’un motif coloré (nommé la «macule») digne d’un tatouage de chef indien. De loin, le labelle évoque le corps d’une abeille. C’est en tout cas ce que pensent les mâles de plusieurs espèces d’abeilles solitaires qui reconnaissent l'abdomen de leur femelle (les phéromones sexuelles dégagées par la fleur parachèvent l'illusion) sur lequel ils se précipitent et se frottent, assurant la pollinisation. Autre appât: deux petits nectaires luisants sont situés de part et d’autre de la base du labelle. On les surnomme les pseudo-yeux.

Les Orchidées étonnent, fascinent, et le vocabulaire sophistiqué qui leur est associé ne saurait être présenté ici de manière exhaustive.




Je vous invite à nous retrouver dans un prochain article, où il sera question des inflorescences particulières en grappes, en ombelles, en corymbes ou encore en capitules (pour ne citer que les plus célèbres), et du vocabulaire spécifique aux Poaceae (ou Graminées), des Sauvages aux fleurs très discrètes. To be continued...


D'autres leçons de botanique consacrées aux fleurs sur Sauvages du Poitou:

- Le vocabulaire de la botanique (4): les fleurs régulières
- Le vocabulaire de la botanique (6): inflorescences et capitules
- Le vocabulaire de la botanique (7): Poacées, herbes, céréales, pelouses et gazons

Articles consacrés à la pollinisation par les insectes sur Sauvages du Poitou:
- Insectes pollinisateurs (1): la Sauvage et le coléoptère
- Insectes pollinisateurs (2): la Sauvage et le diptère
- Insectes pollinisateurs (3): la Sauvage et le papillon

Pour aller plus loin:

- Société Française d'Orchidophilie de Poitou-Charentes et Vendée

 

Sauge des villes et Sauge des champs
Date 26/05/2017
Ico Prairies

Salvia pratensis, Sauge des prés, Biard Petit Mazay (86)

Sauge des prés, Biard Petit Mazay (86)


Salvia pratensis (Sauge des prés) et Salvia verbenaca (Sauge à feuille de verveine) appartiennent aux Lamiaceae, une famille qui rassemble des Sauvages aux saveurs et aux arômes remarquables, aux tiges à section carrée et aux fleurs en forme de bouche. C'est à une gueule ouverte de serpent que nous ferons peut-être penser les fleurs des Sauges, leur style saillant se terminant en fourche, comme la langue bien pendue d'un reptile. Le Poitevin qui a l'imagination fertile y voit plutôt une «Langue de bœuf», le surnom des Sauges en poitevin-saintongeais.


Salvia pratensis, Sauge des prés, Béruges (86)

Fleur «reptilienne» de la Sauge des prés: la lèvre supérieure de la corolle est recourbée comme un croissant, la lèvre inférieure est trilobée.


Salvia pratensis, la Sauge des prés, est une vivace qui s'installe généralement sur les bords des chemins, les terrains vagues, les prairies agricoles en cours d'érosion. Salvia verbenaca, la Sauge à feuille de verveine, également vivace, fréquente les mêmes milieux avec une prédisposition plus urbaine, alors que la Sauge des prés est d'avantage champêtre... En somme, nos deux Sauvages font un peu office de Sauge des villes et de Sauge des champs!


Sauge à feuille de verveine, Salvia verbenaca, Poitiers sous Blossac
Grappe allongée de fleurs discrètes pour la Sauge à feuille de verveine (Poitiers sous Blossac)


C'est l'observation des rosettes de feuilles plaquées au sol qui nous permettra de distinguer nos deux Sauvages avant floraison: les feuilles sont plus découpées chez la Sauge à feuille de verveine (d'où son nom) que chez la Sauge des prés.


Salvia verbenaca versus Salvia pratensis, Sauvages du Poitou

Rosettes de feuilles découpées de la Sauge à feuille de verveine à gauche versus Sauge des prés à droite.


Ces deux spécimens spontanés et communs correspondent aux Sauges que l'on peut croiser en Poitou (comme partout dans le pays), mais vous pourrez en rencontrer d'autres en fonction de votre région, qu'elles soient sauvages (Sauge éthiopienne dans le sud est de la France, Sauge verticillée dans l'est, Sauge glutineuse en montagne...), cultivées (Sauge officinale, Sauge des bois nemorosa...), échappées des jardins (Sauge sclarée...) ou issues d'hybridations entre elles (Sauge des bois x sylvestris...). Le genre Salvia comporte plus de 600 espèces à travers le monde. Les jardiniers qui leur vouent une véritable passion les ont grandement aidés à passer d'un continent à l'autre au fil des siècles: en Europe, c'est pas moins de 150 espèces qui sont commercialisées, pour leur saveur bien sûr, mais aussi pour leur beauté plastique.


Salvia pratensis, Sauge des prés, Béruges (86)

C'est vrai qu'elles sont belles nos Sauges, et forcément très fréquentées (Thomise variable, Misumena vatia sur Sauge des prés)

Mais grâce a mes efforts personnels et grâce à mon téléphone, j'ai pu appeler à notre secours le génie rural. Et le génie rural, le voilà!

(Manon des sources, Marcel Pagnol)

Les fleurs en forme de gueule ouverte de certaines Sauges ont inventé un drôle de mécanisme pour assurer leur pollinisation. Approchons nous des grandes fleurs de la Sauge des prés (ou de la Sauge sclarée au jardin): les butineurs utilisent la lèvre inférieure comme plateforme atterrissage avant de s'engouffrer dans la gorge de la corolle pour y chercher le précieux nectar. Mais voilà, des barreaux barrent l'accès au trésor... En forçant le passage, le butineur enclenche une mécanique de contrepoids qui fait pivoter les étamines vers le bas, jusqu'à ce que leur anthère touche le dos de l'insecte pour y déposer le pollen.

Salvia pratensis, Sauvages du Poitou!

Les épaules ainsi saupoudrées, le butineur s'envole vers d'autres fleurs où son dos caressera le style recourbé d'un pistil à maturité (la fameuse «langue de serpent»). La boucle est bouclée! Vous pouvez jouer les abeilles pour savourer toute l'ingéniosité du mécanisme. Enfilez un tee-shirt jaune rayé de noir (cette partie est optionnelle), puis enfoncez une brindille rigide au fond de la gorge d'une fleur de Sauge des prés. Vous observerez le mouvement de pivot de la paire d'étamines qui reviennent en place dès que la brindille est retirée.


Salvia pratensis, Sauge des prés, Chezeau (86)

Le butineur engouffre sa tête dans la gueule ouverte des fleurs de la Sauge des prés. Les deux étamines, cachées sous la lèvre supérieure, s'abaissent alors vers le dos de l'insecte pour y déposer le pollen.


Les Sauges (Salvia) tirent leur nom du latin Salvare, «sauver», en hommage à leurs propriétés médicinales. Leur légende a fait plusieurs fois le tour du monde, entre science et magie: plante de la fécondité chez les romains, encens aux pouvoirs protecteurs chez les amérindiens, plante sorcière au Mexique (Salvia divinorum, la Sauge des devins, est hallucinogène), puissante pharmacopée en Asie (Salvia miltiorrhiza, la Sauge rouge à cause de la couleur de ses racines, est utilisée de nos jours dans les traitements contre le diabète)...


Les Sauges sont des herbes sacrées (on les récoltait jadis vêtu de blanc, les pieds et les mains bien lavés), longtemps considérés comme des panacées, bonnes à tout soigner, jusqu'à la mort elle même! Si les Sauges ne peuvent guérir tous les maux, il faut reconnaitre qu'elles présentent un joli cocktail de puissants principes actifs. Il convient d'aborder chaque Sauge au cas par cas (les différentes espèces ne présentent pas les mêmes qualités) et de les utiliser avec parcimonie. La pharmacologie est d'ailleurs loin d'avoir fait le tour de la question. Et même si la plupart des références citent la Sauge officinale (Salvia officinalis) cultivée dans les jardins (qui serait tonifiante, apéritive, antiseptique...), nos deux Sauvages (Salvia pratensis et Salvia verbenaca) ne sont surement pas dépourvues de vertus, bien que peu gouteuses (en condiment ou en tisane) et moins concentrées en principes actifs.


Salvia pratensis, Sauge des prés, Béruges (86)

Sauge des prés, Béruges (86)

- Je cherche un remède.

- Quel mal veux tu soigner?

- Un cœur brisé.

(Once upon a time,  Edward Kitsis et Adam Horowitz)

Face à l'ampleur du sujet, difficile d'être exhaustif sur les qualités de soigneuse des Sauges (voir quelques références intéressantes dans les liens en bas d'article). S'il ne fallait retenir qu'une chose, je vous propose cette tradition ancestrale et bienveillante: les Sauges auraient le pouvoir de réparer un cœur brisé par un chagrin d'amour. L'offrande d'un bouquet de Sauge à un(e) ami(e) souffrant d'une rupture pourrait aider ce dernier à surpasser le poids de son chagrin... Pas si étrange quand on sait les vertus énergisantes et tonifiantes de notre doctoresse universelle!


Dites le avec de la Sauge! Sauvages du Poitou


Lecture vivement recommandée:

- Au pays des Sauges de Bernard Bertrand (collection Le compagnon végétal)


Pour aller plus loin:

- Salvia pratensis : identification assistée par ordinateur

- Salvia pratensis sur Tela-botanica

- Salvia verbenaca sur Tela-botanica

- Salvia officinalis sur Tela-botanica

- Étude chimique de la Sauge officinale sur le site Phytomania


Mélilots, Cirses et Sauges: les adresses sûres pour l'abeille! Sauvages du Poitou

 

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